
Tu le vois bien, ce que tu as perdu de toi. Hier tu as relu un peu le début. T’as vite arrêté tellement c’était pas supportable. Trois ans seulement. Le truc improbable. Frances Farmer au pays des marmottes. Oh tiens à propos de marmottes. C’est dingue comme ta mémoire est douée pour oublier tous les déjà-vus. La même scène mille fois répétée, comme dans le film. Mais évidemment là c’est pas du cinéma, alors tu joues l’étonnée à chaque fois, comme si c’était la première. Et puis tu ouvres un tiroir et tu te rappelles. Tu compares, tu évalues ta distance à l’objet. C’est vachement agréable aussi de laisser le sang transporter cette émotion là. Les souvenirs les plus précieux. Quand la vie c’est trop bien quel que soit l’endroit d’où on la regarde. Quand t’es perchée comme avec la meilleure des dopes. Ces moments où tu comptes. Tu serais prête à tuer pour ça. Addiction, compulsion, obsession. Lave en fusion. T’as trouvé l’insight maintenant. Tu te fais plus d’illusions. Tu vois bien le sale piège. Les gros mensonges, façon j’me la raconte en dulby surround. Alors voilà, c’est terminé. Faut tirer un trait et tant pis si c’est renoncer. Au moins t’auras arrêté de rêver.
Tu divagues. Peut-être qu’au bout tu y arriverais, à la scène parfaite. Le bon timing et les bonnes répliques. Une maîtrise implacable. Comme une mante religieuse. Cynique et imperméable. Impitoyable. Va savoir. Ou plutôt pas, t’as pas envie de savoir. T’as pas envie de vivre cette vie là, pas du tout merci. Plus envie d’approcher si près du bord (à force de glisser sur le beurre). Tant pis (c’est pas comme si tu avais autre chose à proposer). T’as du chagrin. Ça fait du bien. T’es plus en colère, t’es plus désespérée. T’as renoncé. Faut juste te laisser apaiser.
Pleurer. Tu le laisses gonfler, ton chagrin. Tu l’installes, tu en prends soin. Tu lui prends la main. Il n’y a plus personne d’autre que toi et lui et cette mélancolie qui vous accompagne, on dirait un cow-boy solitaire, celui qui avance au soleil couchant des plaines du Nebraska sans trop savoir où il est ni où il va, seulement il sait bien qu’il ne peut pas rester là. Il donne des jambes, pour réveiller son cheval vaguement ankylosé… La fidèle monture. Celle qui est toujours là pour te consoler. Anyday, anytime. Elle t’a vu adopter plus racé. Elle t’a vu filer grand galop et chapeau au vent, sans même une selle. Elle t’a vu rameuter des villages. Sortir les armes. Te battre contre les mirages. Crier. Hurler. Taper du pied. La mépriser, l’oublier. Elle t’attendait.
Question d’habitude.
over mountains and over prairies
/ from dawn ’til day is done / my horse and me keep riding / into this settin’ sun
part’ on that, i-tunes-joke-of-the-day : you’re stuck in the middle. ah ah.
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